L’Art Contemporain, ça fait du bien !
Et si regarder des œuvres d’art étonnantes, parfois bousculantes ou dérangeantes, ouvrait en nous des portes, essentielles à notre participation au monde d’aujourd’hui ?
C’est de l’Art, ça ?
Le Beau artistique ne se présente clairement plus sous forme d’émotions délicieuses dont on se délecte. Il ne nous emmène plus vers les hauteurs de la dévotion religieuse… mais alors quoi ? Que nous proposent ces artistes avec leurs installations incompréhensibles ? Et franchement laides parfois ? C’est de l’Art ça ?
Oui !
Parce que l’Art est un miroir qui nous est tendu, et qu’il reflète les profondes interrogations du temps. Il nous parle de mutations, de destructions et de Re-création. L’artiste contemporain ouvre des routes vers l’inexploré.
” The Gardians ” de Tatiana Trouvé
Alors regardons ensemble ” Les Guardians “, la série des chaises de l’artiste Tatiana Trouvé, que nous pouvons voir au sein de la Collection Pinault, dans la spectaculaire Bourse de Commerce.
Ces chaises, sur lesquelles nous ne nous asseyons pas, encombrées de coussins qu’une empreinte mystérieuse a plissé, témoignent d’un humain invisible, agit comme une respiration. Nous déambulons dans cet espace muséal immaculé de la Bourse de Commerce. Notre chemin tracé nous emmène comme une aventure à travers des images. En effet, les « Guardians » de Tatiana Trouvé sont posés comme des points d’orgue dans une partition circulaire.
Le marbre, l’onyx et le bronze nous ancrent, et nous parlent par contraste du dérisoire quotidien, de ces vies invisibles dont les fragments convoquent une présence que nous interrogeons. A qui sont ces chaussures modelées de l’intérieur comme des coquillages ?
Ici un badge, une cordelette, une pince à cheveux. Et puis des livres, dont les titres nous parlent des enjeux du monde, de sa grande histoire, du moins celle que Tatiana entend se chuchoter à son oreille. Et qu’elle relaie.
L’empreinte en creux devient aussi vivante que ce qui l’a créée. La mémoire des formes est donc ici si célébrée, si magnifiée qu’elle révèle la substance des Gardiens. Mais quels gardiens ? Ceux des chaises des musées ? Ou bien d’autres, plus menaçants ou plus familiers ?
Tatiana Trouvé avait confié lors d’une interview à France Culture, sa fascination pour cette fonction de « garder » des œuvres, elle qui a expérimenté, en arrivant à Paris, cet étrange travail, pas si anodin. Pour elle les expressions plastiques des artistes sont douées d’une vie propre, d’un inconscient. Et le gardien qui veille sur ces « forêts » porte alors une responsabilité impressionnante.
Le sujet de l’oeuvre d’art
Ainsi, cette conversation avec nous-mêmes, provoquée par une œuvre qui se déplie comme autant d’univers, est nécessaire : elle nous réveille et nous rend vivants. Et nous transforme sans cesse.
Finalement, c’est le sujet même de l’œuvre d’art et de l’Art Contemporain en particulier, non ?
Rédactrice : Françoise Hotier.
Photo : Bourse de Commerce — Pinault Collection © Tadao Ando Architect & Associates, Niney et Marca Architectes, Agence Pierre-Antoine Gatier.
Photo Marc Domage